Les inspirantes
Karima CHIBANE • 14 septembre 2019
Une inspirante
est une femme qui a traversé sa crise de mi-vie en laissant derrière elle, les apparences, les injonctions de conformité et quelques conditionnements.
Elle est dans la seconde partie de sa vie, tout le chemin parcouru l’a conduite vers elle-même, elle a trouvé sa vérité, son identité, sa marque unique.
Dorénavant, elle a décidé de s’assumer telle qu’elle. Après avoir répondu à tellement d’injonctions sociétales, notamment celle du trio JMB : soit Jeune, Mince et Belle pour être désirable et aimable. Elle a traversé une partie du pays de la quête de soi, non sans heurts, un chemin parfois chaotique mais tellement riche.
La quête de soi pour l’être humain est une préoccupation constante au cours de sa vie, tous les courants philosophiques l’évoquent comme une étape nécessaire vers sa liberté intérieure. Cette poursuite se retrouve bien entendu au cœur de toutes les traditions mystiques et toutes les religions l’évoquent comme un parcours initiatique. C’est une recherche de ce qui est essentiel qui dépasse l’individu tout en le conduisant au cœur de lui-même. C’est un mouvement puissant qui cherche l’essentiel non plus à l’extérieur mais à l’intérieur de soi. C’est ce même élan, cet appel que traduit ce que l’on nomme aujourd’hui la « crise de mi vie » ou « crise de milieu de vie » ou « transition du milieu de vie » qui se manifeste dans les territoires des quadras ou quinquas des deux sexes.
Cette appellation apparaît en 1965, les Américains la nomment « middle life crisis ». Elle instille en chacun à cette période, une sorte de désir de quelque chose d’autre et un appel au changement. Une sorte de condensé d’un besoin sourd de développement à la fois psychologique, émotionnel et spirituel. Selon les psychiatres, les écrits et les études principalement nord-américaines, près de 80% des individus de 40 ans à 55 ans vivent cet état de crise.
Cette période est généralement plutôt chaotique, porteuse de doutes, de confusion avec une forte prise de conscience de sa mortalité et de la fugacité du temps qui prend soudain un autre sens, il devient désormais compté.
Elle peut être fortement transformatrice dans la profondeur car elle est une véritable rencontre avec l’intime de soi. Dans le quotidien cela peut se traduire par des divorces, des dépressions, des relations extra conjugales, des pertes de sens ou des angoisses notamment.
Ce chamboulement est aussi une phase de croissance potentielle, elle permet de déconstruire l’existant pour une reconstruction plus adaptée à son propre besoin. Comme une sorte de promesse d’un épanouissement authentique de soi-même. A l’image du mot crise en chinois « Wéiji », qui signifie à la fois « danger et opportunité » avec un caractère plutôt favorable. Cela donne une vision de la crise toujours positive car elle permet la création et la construction de la nouveauté.
Pour les femmes, cette profonde remise en question se couple avec la ménopause, car son pic selon des études américaines se situe à 50 ans. Le conseil majeur, s’il y’en a un, est d’une part de tâcher de garder son calme car cette période est transitoire et d’autre part de profiter du côté opportunité qu’offre cette crise. Comme l’indique le psychiatre Christophe Fauré, il s’agit d’une transition où « l’ombre et la lumière émergent en parallèle ». Il nous revient de faire le tri entre les deux selon ses besoins et ses envies.
En comprenant cette période et les mécanismes qui sont en jeu, il est possible de vivre cette crise comme une
libération. Un temps de transformation dans les profondeurs, une sorte de mue pour renaître à la personne que vous êtes au fond de vous. Il ne s’agit pas de résister à ce processus transformationnel ce qui peut générer des problèmes majeurs mais plutôt de le comprendre et avancer avec lui dans le même sens. Ne le cachons pas, le courage est nécessaire afin de se confronter à ses peurs, de déverrouiller ses résistances au changement et de s’ouvrir à l’authenticité de son être, c’est une vraie aventure intérieure.
Le bilan de la première partie de vie peut être pris aussi, comme une ébauche. Les réajustements nécessaires sont autant d’atouts pour la seconde partie. Nous avons la possibilité d’être enfin nous même avec toute cette expérience accumulée, nous pouvons créer ce que nous voulons vraiment. Oui, c’est vrai, nous avons un peu perdu de notre jeunesse mais le gain, s’il est perçu à sa juste valeur, est immense. Pour nous les femmes, la voilà donc notre chance de devenir celles que nous sommes au fond de nous et inspirer les autres à en faire de même par notre immense potentiel fertilisant.
A cette étape de la vie toutes les conditions semblent réunies pour se poser « LA question ». Celle dont la réponse permet de trouver un réel sens à sa vie et par conséquent contribue à sentir le bonheur ou le sentiment de bonheur à vivre. Pour Jung les choses sont claires car « ce qui n’est pas rencontré devient notre destin ». Cela veut dire que si nous occultons cette remise en question de la mi- vie en l’ignorant ou en l’étouffant, elle finit par nous rattraper avec une intensité plus importante. Elle pointera avec insistance que nous n’avons qu’une seule vie ici et maintenant.
Il s’agit d’accepter cette période de questionnement et la vivre pleinement comme un processus intérieur pour une nouvelle naissance. Il ne s’agit ni de la raccourcir ou la nier ou encore la « switcher » rapidement en autre chose. C’est un mouvement qui est au service de notre nouveau moi, le laisser se déployer c’est accueillir la naissance de soi-même et cela demande un peu de temps et du courage. Il est essentiel de se donner ce temps, à minima quelques mois avant de prendre des décisions qui peuvent changer le cours de votre vie. Le temps de cheminer avec ces nouveaux désirs, de les laisser grandir en vous, afin d’être certains qu’il ne s’agit pas d’évitement.
N’oubliez pas que nous sommes toutes différentes et c’est bien là que réside notre richesse collective. Pour certaines cette transformation peut advenir avec une certaine fluidité. Cela dépend en grande partie de notre histoire, de notre vécu, du travail fait sur nous-même, de nos croyances et du nombre de boîtes où nous avons rangé des morceaux de notre vie. Toutes ces parties de nous, bien rangées s’ouvrent petit à petit lors de cette période et demandent à intégrer la lumière. Il ne s’agit plus de les occulter, de les bâillonner ou d’ignorer des pans de sa vie. Bien au contraire, nous sommes invitées plutôt à accepter que nous n’avons pas pu faire autrement à ce moment-là, lors de ces expériences. Nous avons fait du mieux que nous pouvions au moment clef et cela était adapté à notre vie, mais aujourd’hui cela est sûrement diffèrent.
Le bilan et le tri qui peuvent se mettre en place, permettent de décider quel nouveau départ nous voulons prendre pour le reste du chemin. De porter un regard bienveillant sur ce que nous sommes, avec nos qualités, nos défauts, notre histoire et nos désirs. Prendre le temps de s’observer et écouter tranquillement ce qui émerge et qui a besoin d’être reconnu. S’appuyer sur ce que nous ne voulons plus pour laisser grandir ce que nous souhaitons pour nous dans les années à venir.
Bonne route !